J’ai « laissé » partir Régis, je stoppe trop souvent, il faut qu’il fasse sa course désormais. Je mise (sans trop y croire) sur la chaleur coupable de mes maux et attends avec impatience un petit peu de frais.
Un peu plus loin dans la course, on se retrouve avec Régis, c’est l’occasion de se boire une petite mousse a la buvette
(gratos pour les coureurs ! c’est pas top çà ?). Auparavant j’aurais fait 3 tours sans m’arrêter, mon record depuis un bon moment. Régis quand a lui, gère parfaitement sa course et compte 8 tours de plus que moi.
5h de course, la bière n’a pas fait effet de « potion magique », j’erre toujours désespéramment sur ce parcours, parfois je n’arrive même pas à réaliser 1 tour, je m’arrête sur les 2 ravitaillements. Cela fait déjà 3 fois que je me change car je transpire énormément, je bois beaucoup pour compenser cette perte (
non, non, pas de la bière !!)
La petite famille arrive vers les 18h30 (mes parents, mon épouse et la plus jeune de mes 2 filles), j’ai essayé de les appeler dans l’après-midi pour leur dire de ne pas se déplacer car je risquais de ne pas terminer mais ils étaient déjà partis. C’est la première fois que je pense à l’abandon sur une course, mais honnêtement je ne prends aucun plaisir aujourd’hui et malgré mes multiples arrêts et mon allure tranquille mon état ne change pas !
J’explique tout cela à la famille, c’est l’occasion de s’en boire une autre avec mon père (au point où j’en suis !). Evidemment ils me demandent d’arrêter maintenant, mais je leur réponds que je gère bien a présent, je ne pense plus a la marque et je peux faire quelques tours de plus pour tenir compagnie à Régis et puis sait on jamais !
La température s’est bien rafraichi maintenant, malgré cela Régis me fait remarquer que je transpire encore et il a raison, je dois être le seul, certains coureurs ont déjà sortis les polaires ou coupe-vent. Je m’arrête une énième fois, je changerais au moins le tee-shirt, et ferais un peu refroidir la mécanique !
Je m’éternise dans le gymnase, tiens pourquoi ne pas aller consulter ? Il y a un poste de la croix rouge au fond du gymnase ! J’explique vite fait mes symptômes aux deux jeunes secouristes présents, ils restent perplexes
et appellent le docteur dans la salle à côté. Après un rapide examen, tension, stéthoscope, etc.… (Ma FC était encore, après un quart d’heure d’arrêt à 90puls/mn) il ne voit pas la raison de mes maux lui non plus, me demandant même si je n’étais pas asthmatique. Non pas que je sache !
Bon ça ne fait rien, de toute façon je n’étais pas venu chercher un remède miracle mais plutôt avoir un indice sur mon état aujourd’hui. Allez, faut que j’y retourne, sinon ils risquent de s’inquiéter pour de bon dehors ! Avant de retourner sur le circuit je passe demander à la famille à quelle heure ils pensent partir pour l’hôtel, dans une petite heure me répondent-ils. Il est 20h, ça me laisse le temps pour un dernier essai. Après j ‘aurais 2 solutions, soit je reste en continuant à marcher de plus en plus et certainement stopper dans la nuit pour dormir un peu dans la voiture, soit je repars avec la famille, l’hôtel réservé est a quelques kilomètres d’ici, une bonne douche et une nuit dans un vrai lit ! M’ouais le choix à été vite fait !
Je retrouve Régis sur le circuit et m’excuses du fait que je vais devoir l’abandonner lâchement, mais de toute façon je ne lui aurais pas été d’un grand secours en cas de coup dur, bien au contraire
. Il est certains que depuis le début de ce 24h je n’éprouve aucun plaisir à courir, à être là tout simplement, je ne pourrais pas dire moi non plus ce qui me tiraille mais pour sûr je me sens complètement a la ramasse ! Nul besoin de courir vite sur ce genre d’épreuve mais être en forme est primordial, cela va faire 10h que j’y suis et je n’ai pas encore fait la moitié, je n’arrive même pas à me visualiser plus loin dans la course. Mieux vaut en rester là !
Bizarrement cette dernière heure est passée assez rapidement, c’est toujours comme ça quand on sait que c’est fini derrière. Le dernier tour arrivant je préviens Régis que je vais augmenter la cadence pour coller au train des relayeurs, il me suit ! Un petit signe a la famille en leur disant « c’est le dernier !! » et nous voilà partis ! Je voulais vérifier l’état des jambes, s’il y avait des douleurs physiques, mais c’est bien ce que je pensais les gambettes déroulent à merveille, y’a pas de soucis de ce côté. Par contre heureusement que le tour ne fait que 1000m car je souffle comme un buffle maintenant. Voilà on arrive (presqu’au sprint) devant la table de marque
, je stoppe en encourageant une dernière fois Régis, j’enlève une a une les épingles qui tiennent mon dossard, et le rend aux « pointeurs » en leur disant « c’est fini pour moi ! », Ils ont l’air assez surpris de la chose
, c’est clair que s’ils ont vu le dernier 100m
! Il est 21h04.
C’est mon premier abandon sur une compétition mais paradoxalement je ne suis pas déçu
, je ne saurais expliquer pourquoi. On reste 20mn de plus le temps de souffler un peu puis un dernier signe à Régis et c’est le départ pour l’hôtel, désormais la course lui appartient.
Résultats : 10h de course pour 71km.