4ème partie : tenir, tenir et finir !!!
Je repars avec Geneviève et Laurette.
Je fais une bise à Karine
(elle m'a trouvé très fatigué à ce moment et pensait que la bise était un signe de mon futur abandon ... pfff ... au contraire, ça m'a fait tellement de bien de la voir là que je lui ai fait cette bise pour la remercier !!!) et on repart ... Physiquement j'ai repris le dessus et avec Geneviève et Laurette à mes cotés je suis maintenant certain d'aller au bout
... Là ce sont les faux-plats de la forêt de la Coubre ... je sens que je reprends le dessus physiquement, que les jambes tournent mieux mais ... ça reste dur
! J'arrive de nouveau à plaisanter et à papoter mais mes accompagnateurs veulent que je parle moins
(un comble, d'habitude ils trouvent que je ne parle pas assez
!!!) ... Le temps passe nettement plus vite en leur compagnie, même si je continue de perdre du temps dans les montées
! On arrive au ravitaillement de Youpi-Land ... je conserve toujours le même ravitaillement ... le 80ème est passé en 8 h 31 mn 40 (les côtes continuent de me pénaliser) ...
Ah ... on attaque la ligne droite du Club Med ...
Laurette va un peu vite et Roberto qui discute avec elle ne s'apperçoit pas que je n'arrive pas à suivre ce train-là ... Heureusement,
Geneviève reste à mes côtés ... on commence à avoir l'habitude de courir ensemble (entraînements, sorties longues, compétitions) et sa foulée est idéale ... je me sens de nouveau bien ... ma cadence est remontée ... je papote avec Geneviève et je ne vois plus les km défiler, j'oublie la fatigue et je me régale de nouveau ... je dépasse un tri-athlète tout en bleu
(ça fait plaisir aux filles qui le trouvait un peu trop frimeur
... le pauvre, il a quand même l'air mal en point
) ... là,
on rigole moins ... on attaque la partie la plus difficile ...
les montagnes russes !!! Laurette pousse Roberto dans les montées
!!! Les côtes sont trop dures pour essayer de les monter en courant donc je récupère bien en marchant et finalement, bien aidé par Geneviève, ces difficultés sont passées plus facilement que je ne le pensais
... le ravitaillement du 85ème arrive déjà ... 9 h09 mn 58 (oh, malgré la grosse difficulté, j'ai très nettement accéléré
!) ... petite pause pour changer de maillot ...
celui là était couvert de sang (la pointe des seins !) et on arrive vers la civilisation ... ça fera moins peur !!!
On arrive à la Grande Côte ...
Karine est là avec son cri de guerre (wouh wouh wouh wouh wouh !!!) ... je réponds (wouh wouh wouh wouh wouh !!!) ... et là, c'est très drôle, le public présent (enfin !!!) reprends en coeur (wouh wouh wouh wouh wouh !!!)
... évidemment, ma petite soeur et moi on en remet une couche et toute le monde rigole ... très sympa comme petit moment
... ça m'a mis la pêche et je garde mon rythme ... Roberto s'inquiète de nouveau ...
il trouve prématuré de se lâcher à 15 km du but ... il a sûrement raison
, mais les derniers km sont trop durs et si je ne le fais pas maintenant que c'est facile je vais le regrêter
... c'est dimanche après-midi, il fait beau
, il y a beaucoup de monde sur les corniches et les pistes cyclables et ils n'ont pas forcément
envie de s'écarter pour des
qui courent pendant 100 km !!
Il faut se mettre à leur place ... se pousser d'un mètre pendant 30 secondes pour laisser passer un coureur, ça leur gâcherait leur après-midi
!!! C'est ça le respect ... encore heureux qu'on leur demande pas d'applaudir
!!! On commence à faire de jour ce qu'on a fait de nuit ce matin ... le paysage sur les corniches est magnifique
... On arrive sur la plage du Platin mais contrairement à ce matin on reste sur la corniche ... Roberto est déçu et décide quand même d'emmener mon vélo sur la plage
!! La remontée sur les bords de la falaise est le début de la fin pour moi
... trop dur ... j'ai de nouveau perdu mon sourire
... tiens, le dormeur de tout à l'heure me redouble ... sa sieste lui a été profitable
!! je m'accroche jusqu'au ravitaillement du 90ème où je passe en 9 h 50 mn 34 (
j'ai gardé un très bon rythme, je ne perds pas beaucoup de temps malgré la pause "changement de tenue" !) ...
Plus que 10 km !!! Si c'était tout plat je le ferais en moins de 11 h 00 mais avec ce qui m'attend je n'y crois plus ... on peut encore accrocher les 11 h 15 ... ça va être dur mais pourquoi pas !
Le redémarrage est terrible ...
je sens tous les muscles du bas du mollet jusqu'en haut des cuisses ... aucun n'a envie de continuer ...
et pourtant, il va bien falloir !!! Geneviève et Laurette trouve les mots pour me relancer ... et on descend sur le bord de la plage ... YES, ça repart ... c'est tout plat jusqu'au bout de la crique ... YES, ça relance ... hop, ça remonte sur la corniche ... OH NO NO NO ... "putain" que c'est dur ... j'en peu plus ... sur la corniche je me faufile entre les spectateurs ... j'ai ma garde rapprochée ... Laurette et Geneviève se mettent devant moi et écartent les flaneurs, Roberto donne du klaxon ... j'ai l'impression d'être une vedette !!! Et hop, on descend ... YES ... mais je vois la montée qui m'attend et j'ai déjà envie de marcher rien qu'en la voyant
... Geneviève me motive pour que je ne lâche rien ... je m'accroche ... j'essaye de monter celles qui sont moins pentues en courant ... on arrive enfin au casino ... le 95ème est là-haut ...
Karine m'y attend avec ses patins ... on ne fait pas attendre sa petite soeur
!!! Je passe au ravitaillement du 95ème en 10 h 32 mn 16 ... (
Roberto me dit qu'on a regagné du temps sur mon tableau de marche !) ... je vois cette chaise là
... je me marre quand je vois la tête de tous (mon fan-club et bénévoles) quand je me dirige vers elle
... "non, non, t'assois pas, c'est pas bon tu pourras pas repartir" ...
rien à faire, je fais ce que je veux, c'est mon 100 km !!! et je me laisse tomber comme une "merde" sur cette chaise
... oh la la que ça fait du bien
!!!!!
Mort de rire en voyant leurs regards effarés
!!! Roberto m'arrose la tête
, puis les cuisses et les genoux ... Laurette m'apporte double ration d'eau gazeuse
et craint un coup de chaud ... bon c'est pas tout ... il me reste 5 km !!!
Allez, un dernier effort ... ça repart ... ça m'a fait du bien de m'assoir un peu ...
puis j'entends les indiens (wouh wouh wouh wouh wouh !!!) mais la réponse est très faible cette fois ... j'ai plus la force (wouh wouh !!!) ... allez,
la montée du Novotel ... la piste en cailloux n'aide pas trop non plus ... que c'est long ...
pas de panneau 96, ni de 97 ...
un abruti, malgré Laurette et Geneviève, refusera de s'écarter pour moi
... comme je n'ai plus la force de descendre du trottoir, je le percute de l'épaule
(pauvre con ... pas d'autre commentaire ... je ne vais pas gâcher une si belle journée pour un pauvre type
!!!) ... j'en vois plus le bout
... ah, le faux plat de la piscine, ça devient bon ... là je ne m'arrête plus, poussé par Geneviève ...
98ème (enfin !!!) la descente du port ...
ça alors, le tri-athlète est juste devant moi ... "bouffe-le" me crie Roberto tout content ...
pas de problème, il est cuit !! Un petit mot d'encouragement en passant
(je ne suis pas un sauvage quand même !!) ... contrairement aux deux du même club qui me doubleront 200 m plus loin
... il y a un monde fou sur le front de mer mais surtout pour un petit concert
... je passe devant l'estrade des musiciens ... petit instant de gloire
!!! Quoi
?? ils nous font descendre
au bord de la plage ?!?! 6 marches à descendre
(un enfer) ... 20 m de sable mou
(une horreur) pour remonter sur le front de mer juste au 99ème
... un trottoir à monter
, que je rate et je suis à 2 doigts de m'étaler (si je tombe je me relève plus
!!!) ... et le cri du coeur ... "quelle arrivée de merde"
!!!
J'ai pas bien compris ce passage infernal après 99 km
... Je me ressaisi, je retrouve mon sourire
... c'est la grande avenue qui mène au stade ... j'ai tout mon fan-club avec moi ...
mes 2 cyclistes Roberto et Annie, ma patineuse Karine, mes 2 coureuses Geneviève et Laurette, ma pompom-girl Fabienne (André attend au stade)
... Ce que j'ai vu plus tard sur les photos, c'est que le tri-athlète s'était accroché à ma foulée ...
si je m'en étais rendu compte je l'aurais attendu pour finir avec lui ... mais là,
la lucidité me faisait un peu défaut ... j'étais sur une autre planète
... je savourais ce moment avec mes copains
... je finissais un 100 bornes
!!! Quel bonheur
... Je récupère mon petit drapeau breton
...
Puis c'est l'entrée du stade ... il me reste 300 m de piste ... je finis mon tour de piste tout seul pour profiter à fond de ces derniers instants ... j'entends le speaker qui annonce 11 h 13
... je réalise que je peux réaliser les 11 h 15 ... j'ai du mal à y croire ... j'accélère ... j'entends 11 h 14
... aïe, aïe, aïe ... j'entends Roberto hurler mais je ne comprends pas ce qu'il me dit ... je suis concentré sur le speaker ... allez Eric c'est possible
accélère ! Je peux pas échouer avec le drapeau breton dans les mains
! dernier 100 m à fond ... je donne tout ce qu'il me reste
... 11 h 15 mn 06 !!!!!
J'y crois pas ... j'ai réussi
... je l'ai fait
... 100 km ... oh la vache ... quel pied
!!!!! Je me retourne et je comprends enfin pourquoi Roberto criait ... le tri-athlète en bleu a essayé de me gratter au sprint (raté
!!!) et l'autre arrive juste derrière ... après 100 km de course pratiquement en solitaire, on est 3 à finir en 20 secondes !!! L'organisateur me félicite ... ça c'est super sympa ... ça redonne le sourire !!!
Mes jambes sont tétanisées
... Roberto et Laurette doivent me porter pour que je puisse m'assoir (euh ... m'allonger !) dans l'herbe
!!! Que ça fait du bien de ne plus être debout et de ne plus bouger
... je confirme
... il faut être un peu barge pour faire un truc pareil
!!!
Mon fan club est étonné de ma performance et de la gestion de ma course ... je dois avouer que moi aussi quand même ... entre prévoir et réaliser il y a souvent un monde ... En tout cas, sans Roberto, Karine, Geneviève, Laurette, Annie, Fabienne, André je n'aurais jamais réussi une telle course ...
UN ENORME MERCI à Roberto et Karine ... sans eux je n'aurais même pas pris le départ ...